Que les plus exigeants des producteurs italiens ou espagnols viennent faire juger leurs huiles d’olives en France, mieux encore que des producteurs de thé chinois acceptent les conclusions d’un jury français, quelle fierté pour AVPA ! Cette reconnaissance n’est pas venue toute seule, elle est le fruit d’un travail rigoureux et constant qui a respecté quelques règles de base qui ont su s’imposer pour une reconnaissance universelle.
Première règle absolue, fruit de notre vieille culture gastronomique, nous savons qu’il n’existe pas un seul produit d’excellence, une seule échelle de classification. Un concours gastronomique n’est pas une épreuve olympique. Nous sommes dans l’univers du ressenti, du plaisir. Il n’existe peut-être qu’un seul plaisir mais beaucoup de façons de l’atteindre.
Un peu à la façon dont des parents vont chercher pour leurs enfants leur matière d’excellence, leur façon de s’épanouir au mieux, le jury d’AVPA va rechercher pour chaque produit son domaine d’excellence et va commencer par un énorme travail de classification en catégories les plus homogènes possibles pour comparer ce qui est comparable. Un même descriptif peut être considéré comme positif pour certaines familles de goût et négatif pour d’autres. Un exemple évident est le cas de l’amertume. Pour certains, ce sera un défaut, pour d’autres une qualité. Et encore, une qualité ou un défaut pour autant que sa mesure en soit acceptable. Un apparent défaut n’est jamais rédhibitoire et peut même être nécessaire à l’éclosion de l’excellence. N’oublions pas que certains grands vins blancs doivent inclure une touche de pipi de chat et que la présence de musc est nécessaire à la structuration de certains grands parfums.
Ce travail de classification est sans cesse remis en cause. Par exemple de nouveaux goûts surgis de traitements originaux (on pense ici aux cafés fermentés et, pour rester dans le registre de la fermentation, à certaines huiles au fermenté contrôlé) doivent être intégrés par nos jurys qui doivent dépasser les effets de modes propres à chaque génération.
Cette classification doit aussi être contrôlée par des outils et modèles qui lissent les effets de seuil inexorables dans des univers discontinus que connaissent bien les mathématiciens.
Cette rigueur d’analyse s’applique bien évidemment au travail des jurés. Chez AVPA, on s’impose qu’une famille complète de produits soit dégustée par le même jury pour éviter les disparités normales qui existent entre jurys distincts. Et on sait la lassitude des palais sollicités par de trop nombreuses dégustations. Il faut savoir s’interrompre à temps pour garder la fraîcheur des sensations et retrouver le plaisir de la dégustation.
Deuxième grande règle : il n’existe pas un gout universel mais notre bon goût est issu de notre culture. C’est pourquoi, chez AVPA, nous nous imposons une règle qui en étonne beaucoup, nos jurés partent de la même base culturelle issue de leur pratique quotidienne du français. Certains pourraient y voir cette prétention intellectuelle que l’on prête facilement aux français. Il n’en est rien.
D’abord, nous voulons éviter l’écueil des jurys internationaux qui ne sont que le reflet d’une culture dominante (pas forcément la plus sophistiquée !) et, dans la meilleure des hypothèses, s’accordent sur un palmarès qui oublie toujours de récompenser les productions les plus originales au profit des plus consensuelles.
Ensuite, la gastronomie est aussi un acte social et nos jurés ont un plaisir commun, partager ce qu’ils ressentent, échanger leurs impressions. C’est déjà très difficile dans sa langue maternelle. C’est pratiquement impossible dans une langue étrangère.
Notre jury est ainsi le représentant d’un goût français qui, sans prétendre à l’universalité, peut encore être considéré comme suffisamment respecté à travers le monde pour faire le bonheur des chefs ou des pâtissiers issus de cette culture.
Et la porte est grande ouverte à des concours AVPA dans d’autres pays. Dès cette année, un concours café national aura lieu en Colombie et un autre en Équateur, avec un jury AVPA colombien ou équatorien. De même, espérons-nous rapidement monter un deuxième concours européen AVPA pour autant que la COVID nous le permette. Et l’on attend avec impatience les éventuelles disparités de résultats déterminés par des jurys nationaux.
Troisième règle enfin, il s’agit d’un concours hédoniste où la recherche du plaisir est notre impératif. Nous avons besoin des grands professionnels du produit. Leur expérience impressionnante permet la définition d’un vocabulaire, de paramètres de dégustation exhaustifs, d’une classification rigoureuse. De leurs travaux, seront issues les productions les plus intéressantes de chaque catégorie. Encore faut-il les classer et nous entrons alors dans le domaine du plaisir.
C’est là qu’interviennent les passionnés du goût, au premier rang desquels les chefs mais aussi tous ces gastronomes avertis que sont par exemple les critiques gastronomiques ou les amateurs avertis. C’est à eux que revient le délicat travail de mesurer l’intensité relative de satisfaction de chaque produit. Inutile de dire que les palais sont encore plus mis à contribution et qu’il ne saurait être question que ce jury ne déguste pas la totalité d’une catégorie qui est ainsi soumise à son jugement. Travail long et souvent passionné dont le verbatim est souvent riche d’enseignement pour les producteurs eux-mêmes.
Car, et ce sera notre dernière règle, AVPA travaille en toute transparence. Nous nous interdisons de publier les résultats des producteurs qui n’ont pas obtenu de récompense. Nous attendrons, pour faire leur publicité, qu’ils soient acceptés dans la cour des lauréats.
Mais tous les producteurs peuvent accéder aux notations du jury technique. Nous n’avons certes pas la prétention de dire ce qui est bon ou mauvais, d’expliquer comment on passe de l’un à l’autre mais notre expérience nous permet un riche dialogue avec les producteurs pour qu’il puisse trouver les marchés où leur produit saura trouver sa place d’excellence.
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